Par rapport aux peintures à l'huile de l'art occidental, la peinture traditionnelle chinoise revêt des caractéristiques très marquées : dans la peinture chinoise, l'accent est mis sur les traits et l'esquisse des contours, sur la densité et le volume, alors que la peinture à l'huile favorise les couleurs et la recherche des justes proportions, le clair-obscur, la perspective, le coloris et la luminosité. La peinture traditionnelle chinoise adopte une perspective dispersée : autrement dit, l'observation ne se fait pas depuis un point fixe et différentes représentations de l'objet peuvent être intégrées à la peinture. À l'inverse, la peinture à l'huile occidentale utilise une perspective convergente, c'est-à-dire que l'artiste se place à un endroit donné et dessine ce qu'il y voit. Dans la peinture chinoise, les espaces peints sont aussi importants que les espaces vides alors que, dans la peinture occidentale, le plus important est de mettre de la couleur.
• Principes de la Ccontemplation par les Peintres Chinois
La peinture chinoise, qui a une très longue histoire, pourrait trouver son origine dans les poteries néolithiques ou dans les dessins tracés sur les parois de certaines grottes. Les peintures les plus anciennes conservées jusqu'à nos jours sont la Beauté avec un dragon et un phénix et le Gentilhomme chevauchant un dragon, deux peintures sur soie qui datent de la période des Royaumes Combattants. Ces premières œuvres ont jeté les bases de la peinture traditionnelle chinoise qui s'appuie essentiellement sur le trait et l'élaboration de formes.
Au cours de son long développement historique, la peinture traditionnelle a présenté, selon les époques, différentes caractéristiques artistiques et différentes connotations culturelles. Pendant les périodes des deux dynasties des Han et des dynasties du Nord et du Sud, la société, s'unifiant puis se scindant, a connu des changements violents. Cultures extérieures et cultures locales se sont confrontées puis ont fusionnées. La création picturale était alors centrée sur la peinture religieuse et les portraits de personnages historiques : c'est pendant cette période qu'est née la théorie de la peinture. Durant les dynasties des Sui et des Tang, à la suite du développement économique et de l'épanouissement culturel, la peinture a connu une grande prospérité. La peinture de portraits, à son apogée, a tendu à la sécularisation : peinture de portraits religieux, de personnages politiques, ou de femmes. Parmi les peintres les plus célèbres, il faut citer notamment Wu Daozi, YAN Liben et ZHANG Xuan. Lespeintures de paysages, de fleurs et d'oiseaux ont également connu une maturation. Lors de la période des Cinq dynasties et sous les deux dynasties des Song, les villes se sont développées rapidement et la vie quotidienne est devenue le thème principal de l'art pictural au détriment de la peinture de portraits et des dessins religieux. La peinture de paysages et celle de fleurs et d'oiseaux sont alors devenues le courant principal de l'art pictural. Sous les Yuan, les Ming et les Qing, les paysages au lavis et la peinture de fleurs et d'oiseaux à grands traits ont enregistré un essor incroyable. À la fin du 19e siècle, grâce à l'introduction de tableaux et de conceptions artistiques de la peinture occidentale, la peinture chinoise s'est caractérisée par l'épanouissement de différentes écoles et l'apparition de nombreux grands maîtres. Par exemple, XU Beihong, qui combine le réalisme de la peinture occidentale avec le style traditionnel chinois à l'encre, a enrichi la peinture chinoise.
Le Huanghe (fleuve Jaune) fut le berceau de plusieurs civilisations chinoises. Sur les terres fertiles le long de ce fleuve-mère, des tribus se sont établies, des clans de sont formés, la civilisation s'est développée et l'art est apparu.
La peinture chinoise remonte à l'époque préhistorique et les peintures les plus anciennes ont été découvertes sur des poteries de diverses civilisations dans le bassin du Huanghe. Par exemple, la grande et importante culture de Yangshao d'il y a 5 000 à 7 000 ans couvrit une aire étendue de la province du Hubei d'aujourd'hui au sud à la Mongolie intérieure au nord. Ce fut une civilisation de transition de la société matriarcale à la société patriarcale. L'agriculture était déjà largement pratiquée par cette société. Des pièces de poterie raffinée qu'on a exhumées en donnent la preuve. La poterie peinte de la culture de Majiayao du début du néolithique en amont du fleuve, 3 000 à 4 000 ans avant notre ère, est considérée comme la plus raffinée de cette période, et elle présente un niveau de recherche sans précédent. Une autre culture importante est celle de Dawenkou, en aval du Huanghe, il y a 6 000, une société typique de la fin du néolithique. On les regroupe sous l'appellation de cultures de la poterie peinte. Plusieurs poteries exhumées de sites associés à ces cultures sont ornées de motifs et couleurs remarquables. Les images représentent des figures humaines, des poissons, des insectes, des oiseaux, des quadrupèdes, des fleurs, des arbres ainsi que des motifs abstraits. L'avancement de la céramique servit de base au développement de la culture du bronze et peut-être à la naissance de la porcelaine. La céramique, le bronze et la porcelaine ont été d'importants véhicules d'une nouvelle forme artistique - la peinture. Toutefois, la peinture n'était alors utilisée que pour décorer ses véhicules. Les artistes demeuraient anonymes et plusieurs étaient des femmes des tribus nouvellement établies. Même durant les périodes du bronze et de la porcelaine, les peintres étaient encore des artisans qui occupaient un échelon social très bas. Il leur était très difficile de se créer un nom dans l'histoire, même à ceux qui possédaient des techniques raffinées et qui desservaient la cour impériale.
Bien que les plus anciennes peintures remontent à l'époque préhistorique, la plupart des œuvres produites sous les dynasties des Qin (221-206 av. notre ère) et des Han (206 av. notre ère-220 de notre ère) étaient des fresques et des sculptures sur pierre dans les palais et les chambres funéraires. Jusqu'aux dynasties des Wei (220-265) et des Jin (265-420), la peinture s'est développée en un art plus populaire et la soie et le papier sont devenus plus abordables comme support. Cela montre que la peinture chinoise la plus ancienne servait exclusivement l'aristocratie et la religion. Voir plus
Dans la période des Wei et des Jin, il était assez fréquent que l'élite culturelle partage une forme d'art avec les peintres professionnels. À cause de cette participation, la discussion de la théorie de la peinture devint possible. Gu Kaizhi pratiquait consciencieusement la peinture chinoise et dans son œuvre se rassemblent toutes les techniques de la période. Il était aussi un pionnier théoricien. Il a rédigé trois ouvrages sur le sujet, soit De la peinture, Présentation des peintres célèbres des dynasties des Wei et des Jin et Peindre le mont Yuntai. Il a été le premier à proposer la théorie de « communication de l'âme » et à avancer que le facteur déterminant de la bonne peinture était son niveau de « communication de l'âme ». Dans De la peinture il dit : « L'âme appartient à l'autre monde et c'est la totalité de l'effort. » Voir plus
• Gu Kaizhi- le Peintres Chinois de la Dynastie des Jin
Sous les dynasties des Sui (581-618) et des Tang (618-907), un système d'examen officiel se développa pour choisir les mandarins qui serviraient l'empire. Par conséquent, une élite culturelle se forma dès les débuts de l'histoire impériale chinoise. Le but ultime des artistes était de réussir l'examen impérial afin d'être retenus comme mandarins et de pouvoir ainsi réaliser leurs ambitions politiques. Pour atteindre ce but, ils devaient apprendre à lire et écrire parfaitement de manière à devenir des personnes cultivées et des gentilshommes, en plus de réussir l'examen. L'étude de la peinture et de la poésie constituait une part importante de cette formation. Le plus grand philosophe et lettré chinois, Confucius, disait à ses étudiants : « L'ambition doit venir de la vérité (la voie), reposer sur l'intégrité, s'exercer par la bonté, et s'exprimer à travers les arts. » Cela montre que l'intégrité, la bonté et l'art sont des éléments égaux de la véritable grandeur. Confucius disait aussi : « On ne peut être un lettré sans vérité » et « l'art est l'équivalent le plus près de la vérité. » Cela démontre aussi une similarité logique et sous-jacente entre la recherche de la vérité dans le monde spirituel et l'exercice d'une compétence dans le domaine artistique. La pratique de l'art a été élevée au niveau du processus spirituel de recherche de la vérité. Pour eux, apprendre les arts n'était pas une simple tâche en vue d'acquérir un savoir-faire, mais cela signifiait se rapprocher de la voie de la vérité.
Par conséquent, il y avait deux types de peinture : celle qui était réalisée par des artisans pour le plaisir de peindre, et celle des lettrés en tant que cheminement vers la vérité. Voir plus
• Promenade au Printemps (You Chun Tu)
• Archives des Peintures Célèbres des Dynasties du Passé (Li dai minghuaji)
• Yan Liben – le Peintre de la Dynastie des Tang
• Wu Daozi - La Saga de la Peinture Chinoise
• Peinture Bouddhiste en Chine
• Les Peintures des Grottes de Mogao à Dunhuang
Sous la dynastie des Song (960-1279), l'usage de la calligraphie par les peintres devint de plus en plus populaire. Un poème ornait une peinture tout en exprimant sa signification philosophique. Cela dépassait l'habileté d'un peintre artisan ordinaire, qui était généralement une personne non instruite. L'artiste moderne Huang Binhong (1865-1955) a dit que la calligraphie et le dessin suivent le même principe : la clé est au bout du pinceau. Les diverses méthodes de l'art calligraphique de la langue chinoise s'appliquent dans l'art du dessin, dans lequel elles jouent le rôle de techniques fondamentales. Voir plus
• Les Peintres du Nord et du Sud
• Jour du Qingming au Bord de la rivière Bian (Qingming shang he tu)
Plusieurs peintres du XXe siècle pratiquaient encore le style de peinture traditionnelle et parmi eux, de grands maitres de la peinture chinoise se sont élevés. Toutefois, la société dans laquelle vivaient les peintres modernes était beaucoup plus complexe que celle de leurs prédécesseurs. Si elle acceptait généralement la notion des « styles chinois comme structure fondamentale, techniques occidentales pour l'usage pratique », les peintres chinois traditionnels devaient encore faire face aux défis venant de la culture occidentale déterminante et des valeurs qui lui étaient associées, et se réajuster dans les nouveaux rôles qu'ils jouaient dans une société ou les valeurs chinoises traditionnelles déclinaient peu à peu. Voir plus
• Maitres de la Peinture Chinoise Traditionnelle
• Peintres Formés à L'étranger
• « Modernisme » et « Post-Modernisme »
Une autre importante école de pensée en Chine réside dans le taoïsme et le Dao De Jing (Livre de la Voie et de la Vertu), ouvrage du fondateur du taoïsme Laozi. Cet ouvrage est aussi considéré comme un texte important sur la peinture. Laozi disait : « Une voix forte semble douce », « une grande forme semble vague », « une grande compétence semble facile ».
Durant la période des Royaumes combattants (475-221 av. notre ère), le roi du royaume de Song invita un groupe de peintres à son palais. Presque tous les invités, bouleversés par cette occasion inattendue, restèrent figés et tremblants devant la cour. Un seul d'entre eux était très à l'aise et arriva plus tard que les autres. Il se mit à l'œuvre sans hésitation puis retourna chez lui après une simple manifestation de courtoisie. Le roi était très impressionné et envoya immédiatement un serviteur chez lui. L'émissaire rapporta au roi qu'il avait vu l'artiste assis chez lui, nu, sans aucune crainte ni attente. Le roi déclara qu'il était alors un vrai peintre.
Un autre sage reconnu comme chef spirituel du groupe d'artistes chinois est Zhuangzi (env. 369-286 av. notre ère). Zhuangzi a écrit : « La nature possède la plus grande beauté », et il a prôné les idées de « marcher avec la nature », de « tranquillité intérieure », et de « concentration sans distraction ». Il a raconté une anecdote dans Essai sur Tianzi : Zhuangzi pour illustrer son point de vue. Zhuangzi pensait qu'un vrai peintre ne doit pas se laisser arrêter par des détails. Il doit agir selon son esprit et peindre librement. Les taoïstes pensent que la simplicité est ce qu'il y a de mieux. Laozi disait : « Ce que tu vois n'est pas ce que tu apprends. C'est la voie du monde. » Zhuangzi pensait de même. Dans Ciel et Terre : Zhuangzi, il a écrit : « Les cinq couleurs ne font qu'éblouir les yeux. » Selon lui, « la simplicité est l'essence sans déguisement. » Il croyait fermement que « rien n'égale la beauté de la simplicité » (La Voie du ciel : Zhuangzi). Laozi et Zhuangzi ont tous deux prôné la philosophie de la simplicité sans les « cinq couleurs inutiles ». « Assis nu » était une illustration de la paix intérieure et de la liberté d'esprit qui inspira le lavis à main libre comme style ultime de la peinture chinoise.
La peinture chinoise se divise en trois grandes catégories : peinture de portraits, peinture de fleurs et d'oiseaux, et peinture de paysages. En apparence, la division se fait selon les sujets représentés, mais en réalité, elle s'appuie sur les conceptions et les idées que le peintre souhaite représenter : la peinture de portraits dévoile les apparences du monde et la réalité des relations entre les hommes ; la peinture de paysages combine en un tout l'homme et la nature pour traduire l'unicité harmonieuse de l'homme et du cosmos ; la peinture de fleurs et d'oiseaux décrit, quant à elle, les différents types de vie dans la nature et dévoile le dynamisme ininterrompu de l'univers. Ces représentations constituent le véritable sens de l'art chinois.
Les lettrés formaient la véritable classe dirigeante qui contrôlait le pouvoir de la parole de la société. Ils peignaient et publiaient des livres pour répandre leur théorie de la peinture et pour discuter des techniques qu'ils prônaient. Donc, ils ont effectivement établi les critères selon lesquels on jugeait les œuvres. Mais encore, ils étaient plus intéressés par la signification ou la théorie de la peinture, car ils utilisaient la peinture comme moyen de recherche de la vérité. La peinture était un moyen, non pas une fin. Elle était un procédé et non le produit fini. Leurs critères pour juger un peintre ne résidaient pas seulement dans son usage du pinceau mais aussi dans son habileté à s'illustrer en tant que philosophe. Voir plus
• Peintres La Peinture des Érudits: Su Shi et Mi Fu
• Zhao Mengfu et « Quatre Maitres de la Dynastie des Yuan »
• Les Écoles du Sud et du Nord
• Fleurs de Prunier, Orchidées, Bambous et Pierres
• « Quatre Moines » et « Quatre Wang »
• Fin de la Peinture Chinoise des Érudits
À la dynastie des Song, le paysage était parvenu à dominer la peinture chinoise. Les peintres voyageaient beaucoup dans les forêts et les montagnes où ils passaient des jours à observer la nature afin de reproduire convenablement la beauté naturelle de divers endroits, et les saisons et les types de climat de manière impressionnante. Voir plus